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Il y a 20 ans, le TGV métamorphosait notre région

© La Provence - 850 000 trains ont circulé sur les 250 km de la ligne à grande vitesse Méditerranée durant les deux dernières décennies. La circulation commerciale pouvant frôler le seuil des 300 km/h.

 

De la journée de ce 7 juin 2001, Pierre Izard, alors directeur du projet de la ligne nouvelle TGV Méditerranée, garde le souvenir de l'embrasement de l'immense double viaduc des Angles, dont les 1 500 mètres conçus par l'architecte Michel Virlogeux, enjambent le Rhône pour rejoindre la gare TGV d'Avignon. Parmi les 5 000 personnes venues à cette inauguration, Jacques Chirac, descendu du train en provenance de Marseille où venait de se dérouler, moins de trois heures auparavant en gare Saint-Charles, la première étape d'une inauguration à grande vitesse. Le temps de dévoiler un totem célébrant les 250 km de la ligne nouvelle, d'exprimer "qu'il est désormais possible de traverser la France du Nord au Sud en trois moins de temps qu'il y a 20 ans" et surtout bien plus vite que l'avait imaginé Louis Philippe en 1840, le Président s'était engouffré dans le TGV teinté de bleu pour la cité des Papes. Qu'il quittera vers 20 h 30 pour sauter dans... un avion. Et refait vers Paris le trajet qu'il avait précédemment quitté... en avion. Il est vrai que ce jour-là, le TGV Méditerranée n'était pas encore en exploitation commerciale. Il ne le sera que le 10 juin.

Pierre Izard qui depuis le début de 1990 travaille sur le dossier - il était alors un jeune ingénieur de 34 ans -, sait que cette ligne qui a nécessité 10 ans de travaux, la construction de 483 ouvrages d'art et de 12,7 km de tunnel (dont un de 8 km à l'entrée de Marseille), est pionnière. "En partant de Valence nous entrions dans un territoire différent et bien plus complexe que nous avions jusque-là connu. Il y avait une attente, mais l'habitat était diffus et nous avons dû établir des variantes face aux craintes et aux oppositions. C'est ce qui explique que pour inscrire 250 km de ligne sur le terrain, il a fallu en étudier 2000 ! Mais le résultat est que cette ligne a été la première à développer une méthode de concertation et une approche environnementale. Ce n'est pas un hasard si le rail enjambe par quatre fois le Rhône et par trois fois la Durance", explique celui qui, 20 ans après la mise en service, est pour quelque temps encore, en charge de l'innovation et des projets du groupe SNCF. C'est ainsi grâce au TGV Méditerranée que la Commission du débat public a pris forme et que ses cahiers d'acteurs doivent être pris en compte par un maître d'ouvrage. C'est aussi parce qu'il y avait nécessité de s'inscrire dans les paysages que sept viaducs "sont hors du commun". "Nous avons même fait preuve d'audace pour les gares. Notamment pour celle de l'Arbois". Une implantation un temps contestée, mais 20 ans plus tard appréciée des entrepreneurs aixois. "Je disais qu'en passant devant pour aller à l'aéroport, elle donnerait l'envie de prendre le train", résume Pierre Izard. Bref, le TGV Méditerranée a surtout réveillé le Sud et Marseille, sa capitale. Laquelle, 20 ans plus tard, n'en a pas fini avec les mutations induites.

Le 10 juin 2001, le train du premier voyage commercial du TGV Méditerranée arrive en garde de Marseille Saint-Charles. © PHOTO FRÉDÉRIC SPEICH

 

À Marseille, avec deux décennies de recul : "Un grand merci à ceux qui ont osé faire cette ligne"

Philippe Korcia, à la tête du groupe aixois Voyages Eurafrique, voit dans le TGV "le mode de transport qui a radicalement transformé la façon de se déplacer entre Marseille, Lyon et Paris. C'est banal à dire, mais la grande vitesse a rendu service en rendant possible le déplacement quotidien de centre-ville à centre-ville, bien plus efficace. Cela a séduit des cadres et des chefs d'entreprise qui ont économisé des nuits d'hôtel et des voyages en avion. Mais cela, je le vois bien dans mon métier, a aussi amené une autre clientèle, plus jeune. En 20 ans c'est tout un nouveau mode de vie qui s'est développé autour du train et cela se poursuit. C'est la preuve que le TGV Méditerranée a été et est toujours dans l'air du temps, qu'il a répondu à un vrai besoin de rapprochement."

Alain Lacroix, nommé en 2009 à la tête de ce qui était alors la Caisse d'épargne Paca, avoue n'avoir jamais hésité. "Quand je suis arrivé à Marseille, ce n'était pas pour y rester sans bouger. Il fallait remonter régulièrement à Paris et j'ai tout de suite opté pour le train. C'est moins élitiste que l'avion et plus pratique. Le temps de déplacement ramené à un peu plus de 3 heures a été un atout, certes, mais le TGV a aussi amené avec lui cette certitude de ne plus être enclavé. Cela a évidemment joué et joue toujours en faveur de l'attractivité de Marseille car il amène au bord de la mer. Mais Avignon et Aix en ont aussi profité."

Le TGV "élément de mobilité structurant", comme le dit Alain Lacroix, est bien plus encore pour Jean-François Suhas qui n'hésite pas à classer ce projet "parmi les cinq plus grands évènements de ces vingt dernières années, au même titre que le programme Euroméditerranée ou Marseille Capitale de la Culture." Puis le pilote maritime, élu à la présidence du conseil de développement du Grand port maritime de Marseille-Fos de poursuivre : "Ce TGV a amené une ouverture, il a mis Marseille, Aix et Avignon en lien avec l'Europe. Pour moi qui suis dans la région en 1989, je vois la différence. Ce train a induit du mouvement, donc de la vie et des activités. Par exemple les croisières. Selon une étude faite par la Direccte et la Région, 22 % des croisiéristes qui démarrent un voyage en Méditerranée, soit environ 250 000 personnes et pas que des Français, viennent en TGV. Cela montre bien que cette liaison est un atout". Puis de lancer : "Moi je dis un grand merci à ceux qui ont osé faire cette ligne. Surtout quand on voit les difficultés pour faire avancer des projets aujourd'hui !"

Loïc Chovolon, ancien de l'aéroport de Marseille Provence devenu directeur du Comité régional du tourisme, se souvient des craintes liées à la concurrence du rail. "L'aéroport a perdu du jour au lendemain près d'un million de passagers. Mais cela l'a stimulé et c'est ce qui a poussé au choix du low cost avec le projet MP2. Aujourd'hui les choses se sont stabilisées et train et avion s'avèrent complémentaires dans cette région. La ligne à grande vitesse a contribué à démocratiser le tourisme et cela s'avère être une bonne chose."

Nombre de ces touristes, avides de soleil, sont aussi devenus des résidents. "On a très vite vu cette envie avec les Parisiens, moins avec les Lyonnais. Ils ont profité d'un pouvoir d'achat supérieur pour acquérir des maisons individuelles dans les Bouches-du-Rhône", raconte Jean-Luc Lieutaud, acteur de l'immobilier et à la tête de l'Unis Paca. "Et ne pensez pas que ça se stabilise. Depuis la crise sanitaire c'est reparti de plus belle grâce au train. Pour moi, le TGV Méditerranée c'est un peu comme un métro.

La gare TGV d'Avignon est également devenue un espace d'expositions dont profitent 4 millions de voyageurs annuels.© PHOTO JÉRÔME REY

 

Une grande et belle porte d'entrée dans le Vaucluse qui n'a pas épuisé son potentiel

Il y a ceux dont l'avis est partagé, comme Dominique Taddeï, président de l'association du Parc d'activités de Courtine, où est édifiée la gare TGV d'Avignon. "Cette gare connaît un succès public formidable avec des millions de visiteurs qui y transitent chaque année. Sur le plan touristique, c'est donc une réussite absolue. En revanche, sur le plan urbanistique et en matière de développement économique, il y a encore à faire. Disons que le potentiel existe, mais qu'il n'a guère été exploité jusqu'à présent, ou en tout cas avec bien des années de retard", glisse le chef d'entreprise, faisant référence à Avignon-Confluence, vaste projet de développement du quartier de la gare lancé voici déjà 5 ans mais qui, après une opération de promotion retentissante, semble comme tombé dans l'oubli.

Et puis il y a ceux pour qui cette même gare constitue "...un élément d'attractivité très fort ; un argument très convainquant pour l'invest sur notre territoire." C'est le cas de Cathy Fermanian, la directrice de Vaucluse Provence Attractivité, l'agence départementale dont la vocation est d'attirer des investisseurs. "Nous travaillons régulièrement avec des sociétés implantées en région parisienne, qui ont l'habitude des déplacements en train, mais sont en recherche d'autres solutions d'implantation tout en conservant un contact aisé avec Paris. Pour ce public, quand il découvre que, grâce au TGV, nous sommes à 2 h 30 de Paris et de Roissy ou à 1 h de Lyon, le Vaucluse devient très attractif." Et la jeune femme de citer en exemples Azuvia, start-up parisienne spécialisée dans la phytoépuration, implantée à Agroparc en 2020 ; ou encore Watt & Co, qui prospère dans la connectique électrique et le design connecté à Carpentras, ville directement reliée à la gare TGV depuis la renaissance, en 2015, d'une liaison ferroviaire entre les deux cités vauclusiennes. "Et il y a bien entendu le tourisme, qui occupe chez nous une importance capitale", reprend la directrice de Vaucluse Provence Attractivité. Pour un grand nombre d'entre eux, ces touristes qui ont généré 21,8 millions de nuitées en 2019, sont en effet passés par la gare TGV, venant notamment d'Île-de-France (le plus gros des marchés pour le tourisme vauclusien), ou encore de Belgique (liaison TGV avec Bruxelles).

Une chose est donc sûre : avec ses quelque 4 millions de voyageurs annuels qui transitent par presque soixante-dix trains quotidiens (hors TER), la gare TGV d'Avignon est devenue une porte d'entrée essentielle pour le Vaucluse, le Gard rhodanien et le nord Bouches du Rhône. "Une grande et belle porte", confirme Sébastien Giorgis, l'adjoint au maire d'Avignon délégué au Patrimoine. L'immense cathédrale ferroviaire de ciment-verre et acier voulue par l'architecte Jean-Marie Duthilleul étant en effet venue compléter la déjà fantastique richesse patrimoniale avignonnaise en lui apportant une oeuvre architecturale contemporaine qui n'a pas à rougir devant les merveilles gothiques qu'offre la cité médiévale à ses visiteurs.

 

Et maintenant : la ligne Marseille-Nice, comme une évidence ?

Le jour de l'inauguration du TGV Méditerranée, la question de la desserte à grande vitesse des départements du Var et des Alpes-Maritimes était évoquée par Jacques Chirac. Preuve que cet investissement structurant concrétisé pour servir le développement économique de la vallée du Rhône, et tout particulièrement de Marseille dont le visage changeait déjà sous la poussée du programme Euroméditerranée, était pressenti comme une évidence qui avait ses études. Et ses oppositions. La plus farouche étant celle des vignerons qui déjà refusaient qu'une bifurcation saccage les vignobles. 20 ans plus tard, l'évidence n'a plus rien de simple. Quatre projets d'une liaison ferroviaire rapide ont été enterrés et le sujet demeure sensible. L'idée d'une ligne à grande vitesse sur Nice lancée en 2005 a déraillé et en 2009, c'est le projet d'une desserte par Toulon - le tracé des métropoles du Sud - qui l'emporte. Mais les temps et surtout les besoins, ont changé. Si le rail demeure encouragé dans les discours et si son pouvoir structurant toujours évoqué, la grande vitesse qui a conduit à négliger le reste du réseau et focalise de plus en plus d'oppositions, passe de mode. Qui plus est, l'État se fait plus regardant sur ses investissements. D'où cette dernière mouture d'une ligne nouvelle Provence Côte d'Azur (LNPCA) appelée à se concrétiser selon des phases prioritaires. Les deux premières, destinées à désengorger les gares de Marseille Saint-Charles et de Nice, viennent d'être validées selon un plan de financement de 3,5 milliards, 1,38 milliard étant apporté par l'État et la Région Sud. Une enquête d'utilité publique va être lancée avant la fin de cette année.


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